dimanche 15 novembre 2015

Impressions. Paysages minuscules ( 8 bis )


Ta ville était un labyrinthe. J' en suivais le fil invisible et mélancolique.
Chaque rue, chaque place, chaque rire d' enfant derrière des grilles, menaient à ta maison.
Un toit de tuiles a remplacé les nues, mais les pierres, comme les arbres, gardent l' empreinte de ceux qu' ils ont bercés.

Fallait-il être funambule pour giter entre ciel et terre, poser ses quatre murs à l' exact mitan de cette volée de marches ?

Monter chez soi, ou y descendre, un jour berger, un soir pêcheur.
Aigle ou lombric, à l' heure où dorment les clochers.

dimanche 8 novembre 2015

Impressions. Paysages minuscules ( 8 )


Un ciel de plâtre baignait ta ville ce matin-là.
Le long du quai, yawls démâtés et phares éteints, la pluie mouillait les usines vides.
Je voulais tout savoir. Respirer l' air de tes vingt ans.

Il est des villes lumière, des villes senteurs. La tienne est une musique.
Trois accords de musette pour faire fi de la solitude.
Ici, on lèche sa chope en compagnie. On refait le monde de zinc en zinc.
Si l' on rentre fin saoul, c' est une fille à son bras et l' ombre dans sa poche.

Le souffle des anges se mérite.
Là-haut, la ville ouvre ses fenêtres et s' offre, large, du fleuve qui se replie, à l' horizon qui bossèle.
Si près du ciel on nait, on meurt.
Il reste l' autre rive.

J' ai pris ta main en descendant.

mercredi 4 novembre 2015

Impressions. Paysages minuscules ( 7 )


On marche sous une voûte que soutiennent en grinçant des troncs couleur charbon.
Au plus profond du lit de ce qui fut rivière, le sol ondoie comme un tapis de fossoyeur. Feuilles sans sève, brindilles, écorces gorgées d' eau, macèrent en un cimetière où nul ne vient pleurer ses morts.
Laissant là le vallon rieur, les cris enroués des cabots fous, le bruit des femmes derrière les murs, des hommes gerçant la terre, on pénètre sous l' arche avec des lenteurs de noyés.
Bientôt, le silence encerclera nos oreilles ivres et chaque ombre sera fée.
Le soleil aura disparu, le ciel couché dans sa cage.
Je dois me souvenir... Etait-ce après l' arbre mort ou juste avant la dernière souche qu' un soir d' hiver il a surgi ? La fourrure rousse trempée de neige, la truffe paisible de qui sait de la vie son souffle et son linceul. Quelle cache solitaire, quelle caverne sous les mousses a t' il enfin rejoint après que son œil d' or, en un temps infini, ait pénétré le mien ?
Au bout le chemin s' élargit. Le bois geôlier entrouvre un peu les bras et la lumière nous cueille, comme crachés du Styx et plus brisés qu' un mendiant sous l' orage. Aveugles, on offre nos yeux clos à la soie du soleil.

On rentre en coupant par les champs. Les semelles sont lourdes mais qu' importe.
Nul n' a jamais osé remonter la nuit à contre courant