vendredi 26 août 2011

Paulo



Il était comme ça, Paulo, et s' il avait décidé qu' il irait au mariage de la fille du voisin en bleu de travail et charentaises, rien ne l' arrêtait. Plus têtu que les deux ânes qui lui bouffaient les myrtes du maquis de son île. Et râleur avec ça. Vivre sans bougonner  c'était.. tiens, c' était être mort déjà. Et tout y passait : la politique, les patrons, la flotte, le ciel bleu, les curés, les gosses, les Corses et les pinsutes... Le verbe haut, une voix de caillou et un accent plus parfumé que le figatelle qu' il faisait griller dans sa cheminée en fourrant  ses grosses mains dans les braises pour les étaler. Quand il parlait Paulo, je comprenais pas tout et ça le foutait en rogne parce que, pétard, il parlait français que je sache !
Même quand il me disait qu' il m' aimait bien, j' avais l' impression qu' il m' envoyait sur les roses...

Il a sorti son petit banc au soleil. Le médecin avait dit de rester couché mais les toubibs, ça n' y connait rien et puis qui c' est qui va lui couper ses poireaux si on veut manger de la soupe cet hiver?
Il est tombé, comme ça, le couteau à la main et la tête fichée dans la terre.

Là-bas, l' eau de la fontaine s' est tue. Comme toutes les fois qu' un vieux s' en va.
Demain, ils seront tous là, même ceux des collines alentours. Même les ennemis.
D' un geste lent, ils sortiront le grand mouchoir pour essuyer la nuque en sueur.
Les yeux mouillés aussi, sans doute, sur le chemin du cimetière.

Il prendra l' avion tout seul, elle m' a dit, inquiète et ça m' a fait sourire.
Pas méchamment.

Le soir de ton enterrement, il pleuvait.
Un instant, moi aussi, j' avais eu peur que tu prennes froid.

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