dimanche 2 octobre 2011

Le brouillon


On la menait comme une grosse chèvre un peu rétive jusqu' au lit de mousse épaisse, au débouché du chemin des buis. On lui parlait durement, comme un homme, parce que c' était la seule façon qu' elle connaissait. On lui disait de s' allonger, de remonter sa jupe et d' écarter les cuisses. Qu' il y aurait des bonbons si elle ne faisait pas d' histoires. Des caramels contre un silence... On faisait passer le paquet devant ses yeux bridés. On n' était jamais sûrs qu' elle ait tout bien compris.
Après, il suffisait de fourrager sous son pull, de faire rouler ses seins sous nos doigts terreux pour sentir la chose durcir sous le pantalon. On entrait en elle, maladroits et pas fiers, mais qu' importait qu' on tremble un peu devant cette fille qui regardait le ciel sans gémir.
A l' école, c' est toujours ce qu' ils disaient, les maîtres: prendre le temps du brouillon. On était appliqués. A tour de rôle, dix fois l' on peaufina nos gestes et travaillâmes nos sprints. Nos chéries, les vraies n' auraient qu' à bien se tenir. Pas plus hauts que trois pommes mais déjà de grands couillons de mâles à qui on ne la fait pas. On remontait le pantalon resté coincé aux chevilles comme un vieux ressort déglingué. On passait la main sur nos crânes presque nus, un peu gênés soudain de n' avoir rien à dire de gentil à celle qui réclamait ses bonbecs en sortant sa grosse langue de simplette, comme un chien qui a soif.
Il ne faudra rien dire à ta mère...
Elle dépiotait son premier caramel en poussant de petits cris aigus.

Refermant nos braguettes on partait l' âme en paix. Elle avait déjà oublié...

5 commentaires:

  1. un texte qui met le lecteur mal à l'aise car il est l' otage du regard de ces petit mâles qui un jour deviendront grands ; mais comment ?

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  2. Sa réponse à elle devrait suivre..

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  3. Horrible à lire mais... tellement bien écrit ou... décrit. Ca me donne froid dans le dos rien que d'imaginer que :"cela existe"
    C'est ma première visite et je reviendrais promis... Claire

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  4. Revenez quand vous voulez, je laisserai la lumière.. :)
    Merci Claire

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  5. ses yeux bridés d'handicapée. On repense à la mère, pendue derrière ses volets clos. Vos textes sont un raccourci saisissant pour dire l'horreur du monde.

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