dimanche 1 janvier 2012

Berniques


Accrochées au granit, les berniques rêvent parfois.
Elles rêvent d' être le vent.
D' avoir des ailes ou bien des jambes, comme les bateaux qui vont sur l' eau.
A la mousson, chapeaux chinois, naviguant sur des jonques dans l' odeur du jasmin...
On a tort de croire que les berniques n' ont pas inventé l' eau chaude. Elles savent de nous ce que nous ignorons d' elles. Les yeux brûlés des femmes au retour des marins. Les pêcheurs qui se taisent. Les enfants presque nus...
Aux marées d' équinoxe, chahutées, douloureuses, elles voudraient lâcher prise et se laisser voguer. Elles rêvent d' une main douce qui caresserait dessus, dessous. De mots gentils. De mots tendres. D' un être exquis les appelant Patelle.
Les berniques ont des bleus à l' âme.
Alors, du sel sous la coquille, elles pleurent à gros bouillons.

Mais toi qui regardes la mer, tu n' en verras jamais que deux ou trois ronds dans l' eau...



Texte 2010, remanié
Excellente année à toutes et tous !

10 commentaires:

  1. Mais que vois-je ? Plus besoin de s' appeler Vincent pour laisser des commentaires ici ? :D

    J' ai du retard. Je reviendrai vous lire calmement
    Bonne année Agnès !

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  2. Comme il est tendre votre texte. On a envie de vous appeler Patelle, mais on n'est sûrement pas assez exquis pour se l'autoriser :)

    Bonne année :)

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  3. Notons que « bernique » a deux sens :
    Soit il désigne le nom breton de la patelle (d’après le breton « brennig), soit il exprime le désappointement :Vous comptez sur lui : bernique! (d’après le patois picard)!
    Dans Wikipedia on trouve aussi la définition suivante, que je ne connaissais pas : « Personne qui recherche abusivement le contact des autres (« Quelle bernique, je me le suis coltiné toute la matinée ! »), par analogie avec ce crustacé qui s’accroche avec force aux rochers. Pourtant je ne retrouve ce sens dans aucun de mes dictionnaires. Il s’agit peut-être d’un néologisme ou d’un emploi local.
    Quand j’étais enfant et que je passais mes vacances en Bretagne, on parlait effectivement de « chapeaux chinois ». On allait les arracher comme on pouvait puis on les cuisait une heure durant sur notre petit réchaud de camping. Je garde le souvenir d’un met coriace, caoutchouteux et finalement de peu de saveur.
    Bon, mais toutes ces considérations nous éloignent de ce beau texte, dans lequel les berniques rêvent d’être le vent ou de voguer au fil de l’eau, comme les bateaux. J’aime le passage subtil du bateau à la jonque (amené par le terme « chapeau chinois ») et qui nous ouvre d’autres perspectives, celles d’un Orient lointain. Et puis il y a le sens caché, celui d’une personne qui se ferme aux autres pour se protéger mais qui en réalité rêverait de mots tendres.

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  4. Vincent: Vous avez vu ça ? Dans ma grande mansuétude..... :)

    Jean: Mais si, allons.. quelque chose me dit que si ... :)

    Feuilly: Je ne savais pas que je parlais le picard mais je connaissais ce "bernique" là :)
    Pas le " crampon " en revanche. Je m' en resservirai, ce ne sont pas les occasions qui manquent.. :)
    Même lieu de vacances et mêmes souvenirs que vous. C' était, on peut le dire, franchement dégueulasse, mais dans nos grandes bottes de caoutchouc, nous étions des Robinson et cette saveur là n' avait pas de prix..

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  5. Je sens que nous allons coller comme des berniques à L'anagramme des anges ! :)
    Nous serons comme ce mollusque gastéropode, une bête au pied musclé et à la coquille simple. :)

    Je me demande si ce n'est pas dans un roman de Michel Rio (dans le cycle "contemporain" comme il l'appelle, raconté à la première personne, commencé avec "Mélancolie Nord", Seuil 1997, et qui se poursuit avec "Le Vazaha sans terre", Fayard 2011, -c'est déjà l'an dernier - que j'ai lu quelque chose sur les berniques...

    Par contre, j'ai recherché, c'est dans "Le cheval d'orgueil" que Pierre-Jakez Hélias parle du "train-berniques" ainsi nommé parce qu'il vient de Penmarc'h, la capitale des pêcheurs et il "va jusqu'à la grande gare de Quimper, s'il vous plaît."

    On apprend beaucoup avec la littérature :)

    Je vous souhaite une très belle année, Agnès !

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  6. :))
    Ainsi vous avez le pied musclé ? Pour la coquille simple, je ne vous crois pas, vous êtes trop modeste.. la suite de votre commentaire le prouve. On voit bien que vous en avez sous la coquille !:)
    Belle et douce année à vous aussi, Michèle !

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  7. Petit citadin ignare j’ignorais tout des berniques et de leur triste sort, à les faire pleurer la mer est salée.
    Triste Noël chez les berniques, mais belle lecture, je reviendrai les berniques font recette !

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  8. Oui, revenez, ici les commentateurs sont pointus, si j' ose dire en parlant de berniques... :)
    Merci et bienvenue jms !

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  9. Elles fliquent, floquent par les rochers, saluant bien bas la vague. Elles s'accrochent à des rêves de voyage, accrochées à leur base.

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  10. Elles font comme nous.. s' accrochent à ce qu' elles peuvent, des rochers ou des rêves :)

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