lundi 10 mars 2014

Enfances ( II )


Le dernier buisson avant la victoire.
Retrouver la lumière, courir comme on se tue. Parfois, je le fais les yeux fermés, pour sentir le soleil, encore plus, sur ma peau.
Quatre-cent.. vingt et...un. La voix trainante de celui qui s' y colle. Le regard acéré ramène inexorablement le corps pataud de V. à la ligne de départ.
Pliée en deux comme le laurier qui me protège des yeux impitoyables du loup, je regarde mes pieds. Frotte mon menton sur un genou, lisse comme un nœud d' olivier, pour contenir le gros caillou qui barre soudain ma gorge et fait les jambes de plomb.
Pleurer, parce que le chat est mort, qu' on a perdu aux billes, égratigné sa peau ou que maman s' en va, je sais. Mais quand le monde est rond..
Mais à deux doigts de l' arrivée, le moment tant attendu de se jeter dans le vide, de courir, courir droit devant, en retenant son souffle et danser sur un pied en signe de victoire...
Le soleil a beau prendre sa part au jeu, le temps s' étirer comme un fil de barbe-à-papa, c' est l' hiver tout à coup. Je suis vieille. Je pleure sans larmes, petit soldat pris au piège d' une armée de pourquoi.
On s' inquiète. On m' entoure. Les copains.. Il me semble les voir pour la première fois. Si libres encore. On m' interroge. On veut savoir...
Mais comment dire la nuit au beau milieu du jour ? Le silence dans le rire des enfants ?
La marge, quand tout reste à écrire...

Offrir, déjà, sa nuque frêle à la morsure qui n' a pas de nom.

8 commentaires:

  1. Les bourgeons ignorent le secret des fleurs,
    Les fleurs, celui du fruit amer
    Le fruit amer, celui du fruit mûr
    Le fruit mûr ne sait rien des secrets
    Il gémit seulement de sa maturité solitaire
    Et craint - mais il ne sait encore pourquoi-
    L'insecte porté par la brise du soir.

    RépondreSupprimer
  2. et l' insecte, lui, que sait-il des secrets et des peurs qu' il inspire .. ?

    RépondreSupprimer
  3. Et qui connaît la peur de l'insecte devant l'orage qui arrive ? :))

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Et l' orage a sans doute peur de quelque chose, lui aussi..
      Sinon, pourquoi se rirait-il de nous ? :)

      Supprimer
  4. L'insecte ne sait rien non plus des peurs et de celles qu'il inspire. Il va et il vient dans les jardins à la recherche du fruit mûr. Simplement comme un insecte, Il a l'innocence du Non-Lieu.

    RépondreSupprimer
  5. L'insecte ne nous attend pas, ne réside pas. Il s'écarte, s'enfuit, s'en va...

    RépondreSupprimer
  6. Je suis venue relire. Des fois que j'aurais mal lu. Mais non. Toujours là le terrible poème.

    RépondreSupprimer
  7. Merci Michèle de passer par ici, de repasser par là.. :)
    C' est toujours un grand plaisir pour moi

    RépondreSupprimer